Rassembler en un livre le savoir, le garder à portée de mains : même à l’automne de la vie, ou après le mitan de la nuit, le savoir doit rester accessible et s’enrichir, source inépuisable de créativité.
Le savoir se conteste, se construit et déconstruit, s’argumente, il est l’expression du mouvement de la pensée. Il déconstruit les affirmations, bouleverse les certitudes, c’est le retour à la page 1, il est celui qui interroge. Il ne croit pas, il questionne.
Jamais omniscient, le savoir ausculte pour mieux voir, morcelle pour mieux rassembler. Il est indispensable à la liberté.
Un vade-mecum, cela se construit mot à mot. Les mots révèlent.
Ils révèlent les sensations et les émotions, cette interface entre soi et le monde. Ils révèlent le profond et le superficiel, les deux faces d’une même pièce, la beauté et la laideur.
Le mot n’est pas la sensation qu’il nomme, il est sa représentation et cette représentation nourrit la sensation. L’engourdissement s’imagine froid et immobile, mais il se découvre de toutes les couleurs : chaud et stagnant, brûlant et grésillant, ou bien tiède et picotant… Il ne se refuse rien.
L’attention que l’on porte à l’engourdissement le fait se dégourdir peu à peu, il passe par des crampes, des torsions, des piqûres et chaque fois change d’apparence.
La main apprend ce savoir du corps, elle apprend à se désengourdir dans ce corps-à-corps qu’est l’accompagnement.
Le savoir désengourdit et les mots pour le dire révèlent une structure : celle du corps s’articule comme la voûte céleste, tendue entre l’espace et le temps.
Désengourdir les mots, les sortir de leur carcan, c’est arrêter de leur prêter des intentions, c’est les prendre pour ce qu’ils sont et les rendre au firmament : des milliards de galaxies pour dire la beauté du monde. Des milliards de cellules pour dire la structure du corps.
Mon vade-mecum, à l’automne de ma nuit, c’est l’aube de mon corps…