C’est pendant le sommeil que poussent les os et la psyché se répare, pendant la nuit que les sens s’éveillent : le brouhaha s’est estompé, la vitesse décélère, un autre royaume s’ouvre. Le calme bienfaisant affine l’ouïe, décuple la vision,ouvre les papilles, parfume les narines lourdes des senteurs du soir. Seul l’air en touchant la peau nous dit la fraîcheur des premières heures.
À moins que cet autre royaume entre en expansion, et c’est la poussée.
La poussée est invisible, et pourtant on la constate d’heure en jour.
Comme la vie, la poussée ne peut se définir, mais dès qu’on a le dos tourné, elle en profite : les premières dents finissent par percer et les anciennes par tomber. Les bourgeons deviennent joufflus, les écorces font peau neuve et les vieilles branches n’en reviennent pas de ce nouveau rameau.
Est-ce le son qui augmente ou ma capacité à le percevoir ? Est-ce le torrent qui grossit ou bien la nuit qui fait silence ?
Mais la poussée, c’est aussi cette force du corps qui soulève les montagnes, celle qui ramène la main en surface après que la pression ait été exercée.
Car la poussée libère la pression, celle de la sève qui monte et éclot en bourgeon, comme celle qui s’enfonce dans l’os et la chair, corps et âme.
Même la pression atone peut reprendre du tonus : il suffit de lui accorder le temps immobile et serein de « l’attente sans attente », où tout redevient possible avec une nouvelle poussée de vie.
Alors les pressions toniques entrent en action, larges comme de grands enserrements ou ciblées pour aller vers la profondeur. Il y a celles du plein qui déborde comme celles du vide qui aspire, celles qui révèlent au grand jour ce qui a été subi pour mieux s’apaiser dans le ventre de la nuit.
Sans pression, pas de poussée vers l’aube naissante…
Glossaire
Poussée : impression sensorielle d’accompagnement concernant les retours des pressions toniques, qu’elles soient du vide ou du plein. La main ou une partie de la main arrive à un fond, la butée. Immédiatement ou au bout de quelques secondes voire minutes de pause,la main sent une poussée venant de la partie accompagnée et la soulevant doucement pour la remettre à niveau de la surface corporelle.
Pression : sensation interne d’accompagnement et geste d’accompagnement répondant à un besoin de pression ou de compression adéquate.
Une pression exercée par la main se déroule en trois actes : l’aller, la pause, le retour.
Pression apaisante : sensation interne de la main qui en appuyant apaise les sensations internes rencontrées.
Pression atone : en yukidō, sensation interne indiquant a minima et sans tonicité un besoin de pression maximale. La pression atone ne dégage aucune sensation autre qu’elle-même pendant l’aller, la pause, et le retour. La culée est passive et le retour se fait sans allant.
La pression atone signale une désensibilisation locale de l’organisme qui demande à se « resensibiliser ».
Pression tonique du plein : impression sensorielle d’accompagnement où la main perçoit les besoins de pression et rencontre le plein (de sensations internes) avec une force de résistance passive à l’aller et pendant la pause sur la butée. Cette force de résistance devient active au retour de la pression en ramenant la main à la surface. Quelquefois une aspiration du (trop) plein prend le relai, éloignant la main de la partie accompagnée.
Pression tonique du vide : impression sensorielle d’accompagnement où la main perçoit le besoin de pression et rencontre le vide (de sensations internes) sans résistance à l’aller. La main atteint un fond, reste sur la butée sans la dépasser pendant la pause, puis remonte quand elle sent la poussée du fond, venant de la partie accompagnée.
Pression large ou ciblée : sensation interne indiquant un besoin de pression, par la main entière ou seulement une petite partie (bout des doigts, articulation pliée etc.).
Pression révélante : sensation interne de la main qui, en appuyant, révèle des sensations internes.
Pour l’accompagné, ces pressions sont parfois douloureuses à l’aller et pendant la pause, mais neutres ou apaisantes au retour.